Attentes contre réalité : s’éloigner de sa famille pour vivre en région

Choisir de vivre en région, c’est parfois choisir de s’éloigner de sa famille. Un choix qui donne le vertige à certain.e.s, pour qui la présence de leurs parents à proximité est sécurisante, voire indispensable. Pour d’autres, c’est LE move à faire pour se trouver, apprendre à se connaître en profondeur et parfois même, pour repartir à zéro. C’est le cas de Rose, qui a saisi sa chance d’aller vivre au Témiscamingue, loin de sa famille à Acton Vale, pour le premier chapitre de sa vie d’adulte.

Inukshuk en glace durant un coucher de soleil dans un décor enneigé au Témiscamingue.

Choisir les régions pour se choisir avant tout

Alors qu’elle était sur le point de terminer ses études en techniques de physiothérapie, Rose a décidé d’accepter un contrat de trois ans dans un milieu de soins à Ville-Marie, au Témiscamingue. Non, on ne parle pas de l’arrondissement de Ville-Marie dans la ville de Montréal. On parle bien de Ville-Marie, située à environ huit heures de route de la Montérégie, région natale de Rose.


La raison de son départ est simple et profonde à la fois : elle ne voulait connaître personne dans sa nouvelle ville, pour apprendre à se connaître elle-même. Elle avait besoin de se lancer dans le vide pour se retrouver. Lorsqu’on grandit entouré.e de sa famille, on est influencé.e par son milieu et ça devient parfois difficile de distinguer ses intérêts et ses opinions de ceux des gens de son entourage. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi, mais ça peut mettre un voile sur sa propre identité, ce qu’on porte profondément dans son cœur, pour reprendre ses mots. Et c’est ce que Rose voulait découvrir, à plus de 700 kilomètres de son patelin. Ça, et savoir ce qu’elle avait envie de faire pendant son 5 à 9, maintenant qu’elle n’avait plus son horaire d’étudiante!


C’est alors que sa patronne lui a parlé de Place aux jeunes en région (PAJR), lors de son entrevue. Celle-ci se chargeait de cocher la case emploi de sa liste prédéménagement, tandis qu’une nouvelle collègue l’aidait à dénicher une chambre. Toutefois, elle avait besoin d’un coup de main pour… tout le reste. C’est là qu’est entrée en scène Marion, agente PAJR pour le Témiscamingue, qui lui a organisé un séjour express d’une journée pour trouver ses repères dans sa nouvelle ville d’accueil, Fabre. Les astres étaient alors alignés pour faire le grand move

 

Rose dans son uniforme vert. Elle est technicienne en physiothérapie au Témiscamingue.

S’adapter à la distance

Sans surprise, le départ a été émotif pour Rose, mais surtout pour sa mère. Quand celle-ci apprenait à ses enfants l’importance d’être indépendant.e et autonome en tant qu’adulte, elle était loin de se douter que sa fille allait choisir l’Abitibi-Témiscamingue pour y faire sa vie! Malgré tout, Rose a gardé le cap sur sa décision, contente d’amorcer un nouveau chapitre ailleurs et sans date de retour.


Rose s’était donné comme objectif de retourner voir sa famille en ville chaque mois. Avec un père camionneur qui passait par chez elle toutes les semaines et une mère au bout du fil, elle avait à peine le temps de s’ennuyer. Mais petit à petit, elle a réalisé ce que ça impliquait, réellement, d’être loin de sa famille, dont elle a toujours été proche.


Rose était sans cesse à la tête de l’organisation des rassemblements familiaux : réunions familiales, soupers du dimanche chez ses grands-parents, anniversaires. Après son départ, personne n’a vraiment repris le flambeau et lentement, ces petites réunions familiales sont devenues de moins en moins nombreuses. Par le passé, Rose travaillait fort pour les convaincre de se rassembler malgré son absence. À la longue, la culpabilité a tranquillement laissé place au lâcher-prise et à l’acceptation. Après tout, elle ne peut pas soutenir tout ce poids à elle seule et à distance.


Par contre, le plus difficile dans le fait d’habiter loin de sa famille restera toujours, pour elle, de devoir vivre les épreuves à distance. Le sentiment d’impuissance imposé par la distance peut être insoutenable lorsqu’un proche tombe malade ou se blesse, ce qui avive du même coup le sentiment de solitude inhérent à la distance. Pour reprendre ses mots, ça ne devient pas plus facile de soutenir ses proches à distance, mais on s’habitue.

 

Une décision remplie de sens

Malgré les défis, Rose est loin de regretter son choix. Le Témiscamingue lui a donné des réponses qu’elle n’aurait jamais trouvées en Montérégie et elle en est reconnaissante.


D’un point de vue plus personnel, Rose a découvert toute l’ampleur de sa force intérieure. Elle parle avec fierté de sa résilience et de sa capacité d’adaptation, qui ont été grandement mises à l’épreuve en changeant de milieu de vie. Elle a forgé ses propres opinions, différentes de celles de sa famille, basées sur ses propres expériences. N’ayant pas son cercle rapproché à proximité, elle se sent plus débrouillarde que jamais et subvient elle-même à ses besoins. Son mode solution n’aura jamais été aussi aiguisé!


Du côté social, Rose n’a plus peur de faire des activités en solo, car bien souvent, elle y rencontre des gens un peu comme elle. Elle fait des sorties en raquette le samedi avec un groupe de passionnés de plein air, comme elle, et participe au club local de jeux de société. Eh oui, y’a ça, au Témiscamingue!

 

Rose en randonnée dans une forêt enneigée au Témiscamingue vêtue de vêtements d’hiver noirs.

Somme toute, déménager loin a changé la vie de Rose pour le mieux, mais n’aura rien vraiment changé à ses relations familiales. Toutefois, ce sont surtout les petites choses du quotidien dont elle s’ennuie : les petits soupers en semaine, les anniversaires, les soirées avec ses ami.e.s de longue date. Bien souvent, elle aime s’occuper l’esprit et bien remplir son horaire pour que l’ennui passe. La distance a même, au contraire, atténué certaines tensions familiales. Lorsqu’elle retourne en ville voir ses proches, elle préfère de loin profiter du moment présent et de leur compagnie plutôt que d’alimenter certaines frictions.


Et une chose est sûre : elle libérera toujours du temps dans son horaire pour retourner à l’érablière familiale en Estrie, où elle retrouve ses grands-parents. Une tradition qui est bien enracinée, peu importe la distance qui les sépare.

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