Quand l’immigration est source de richesse !

“Quand l’immigration est source de richesse !”
par PIER-LUC OUELLET

On a tendance à opposer la métropole, diverse et multiethnique, aux régions, qui seraient monochromatiques.

Pourtant, la réalité est toute autre. De nombreux immigrants choisissent chaque année de s’installer loin de Montréal, là où le métro ne se rend pas.

Que cherchent-ils? Pourquoi choisissent-ils les régions? Comment vivent-ils cette expérience?

Nous sommes allés à la source pour répondre à ces juteuses questions.

Le travail comme carte de visite

Les raisons pour lesquelles un nouvel arrivant choisirait Montréal semblent s’imposer d’elles-mêmes : présence d’une communauté culturelle, emplois (pourtant, les emplois ne manquent vraiment pas en région!), présence de services…

Mais qu’est-ce qui motive les nouveaux arrivants qui préfèrent Mont-Joli à Montréal?

La raison première, c’est souvent le travail. C’est le cas pour Deyigbena Spero Paquito Ade, conseiller financier chez Desjardins : « Je suis arrivé du Bénin en janvier 2019. Je suis resté quelques temps à Montréal avant de déménager à St-Hyacinthe. Un organisme avait organisé un salon pour présenter la région. Ça m’a intéressé, je suis venu visiter la ville. J’ai pas décidé immédiatement, mais c’est le travail qui m’a amené ici ».

C’est aussi le travail qui a été la porte d’entrée vers la Gaspésie pour Guillaume Thibault, immigrant français, qui est aujourd’hui propriétaire d’Atkins et Frères, poissonnerie et fumoir située à Mont-Louis en Haute-Gaspésie. Alors qu’il étudiait en France comme ingénieur agroalimentaire, on lui propose de faire un stage à l’étranger qui l’amène au MAPAQ à Gaspé ainsi que chez Atkins et Frères : « Pendant ce stage d’études-là, je suis vraiment tombé en amour avec le coin de pays, et je me suis dit ‘’c’est sûr que je vais vouloir revenir un de ces jours ici’’. Les frères Atkins m’ont dit ‘’si jamais on a un poste pour toi, on t'appellera''. C’est ce qui s’est passé un an ou deux plus tard, ils m’ont appelé pour me dire qu’ils avaient un poste de directeur de production pour moi. J’ai dit oui assez vite ».

Isabelle Cyr-Parent, responsable du Service d’accueil des nouveaux arrivants (SANA) de la MRC de Rocher-Percé, est témoin du processus d’immigration de ceux qui choisissent sa région du début à la fin. Elle remarque également que les entreprises vont courtiser à l’étranger : « On a des employeurs qui recherchent de la main-d’œuvre spécialisée. Ils vont chercher carrément du monde à l’international pour aller chercher l’expertise dont ils ont besoin ».

Quand l’immigration est source de richesse

Quand les immigrants et les gens des régions se rencontrent, ça peut être payant pour toutes les parties impliquées.

Parlez-en à Jean-Pierre Salvas, co-fondateur et co-propriétaire de la Fromagerie Polyethnique I Fromages Le Bédouin.

Agriculteur de père en fils, M. Salvas fait, en 1992, une rencontre qui change son parcours professionnel de façon irréversible : « L’entreprise a débuté avec une communauté de Libanais qui venaient s’établir à Montréal et qui partaient un réseau de distribution de produits de la Méditerranée, mais qui ne trouvaient pas de producteurs pour faire leurs produits à eux », raconte Camille Salvas, fille de l’entrepreneur.

Les agriculteurs de la région de Saint-Robert, en Montérégie, ont donc eu droit à un cours intensif en fromages méditerranéens, comme le haloumi et le labneh : « On a écouté les mamans libanaises qui étaient habituées de le faire à la maison. Ce sont des mamans libanaises qui sont venues nous montrer comment elles faisaient le fromage à la maison! ».

Au début, l’entreprise a surtout répondu à la demande provenant des communautés libanaises. Mais peu à peu, les Québécois ont adopté ces produits (« les Québécois, on est des épicuriens, on aime ça manger des bonnes choses! »), puis les fromages de M. Salvas ont connu un autre regain de popularité avec la démocratisation des régimes végétariens.

Et aujourd’hui, les entrepreneurs libanais sont toujours partie prenante de l’entreprise. Comme quoi la rencontre entre les communautés issues de l’immigration et les gens de région est pleine de promesses pour tout le monde!

Les petites joies de la vie en région

Le travail, évidemment, c’est important. Mais il en faut davantage pour avoir une vie heureuse et équilibrée. Et les nouveaux arrivants qui choisissent les régions découvrent une qualité de vie qu’ils ne trouveraient pas ailleurs.

Bien sûr, c’est l’opportunité de travailler chez Desjardins qui a mené monsieur Ade à St-Hyacinthe. Mais après tout, il y a également des points de services de Desjardins partout au Québec. Pourquoi avoir choisi la Montérégie? Sa réponse tient en un mot : « tranquillité ».

Un sentiment qui est souvent exprimé par la clientèle immigrante d’Isabelle Cyr-Parent.

“On a d’excellents milieux de vie, sécuritaires, des endroits super pour élever des familles.”
Isabelle Cyr-Parent, responsable du Service d’accueil des nouveaux arrivants (SANA) de la MRC de Rocher-Percé

Elle mentionne également qu’un autre aspect de la Gaspésie attire souvent les nouveaux arrivants : « Une clientèle immigrante qui est très intéressée par la Gaspésie, ce sont les gens qui proviennent de régions côtières, ils sont attirés par le bord de la mer. Lorsqu’on quitte son pays et qu’on vient intégrer une nouvelle culture, la présence de la mer, être dans un milieu maritime comme on l’était chez soi, ça apporte beaucoup de réconfort, c’est moins déstabilisant ».

Guillaume Thibault partage ce sentiment; la Gaspésie lui rappelle sa Bretagne natale, plutôt rurale. Il a trouvé dans le bord de la mer et les champs calmes une familiarité qui a rendu l’adaptation plus facile.

Des parcours différents

“Il n’y a pas d’immigrant-type. Il y a des parcours aussi diversifiés que les individus qui les vivent.”
Isabelle Cyr-Parent, responsable du Service d’accueil des nouveaux arrivants (SANA) de la MRC de Rocher-Percé

Monsieur Ade a bien aimé St-Hyacinthe, mais il aimerait découvrir d’autres régions, comme les Laurentides, la Capitale-Nationale ou l’Outaouais, si l’occasion se présente.

Quant à lui, maintenant qu’il est propriétaire d’une entreprise en Gaspésie, Guillaume Thibault ne pense plus à repartir. Après tout, quand il a fait son stage en 2003, il a fait une découverte qui lui a donné envie de ne plus jamais repartir : les gens.

« Mais l’élément qui est au-dessus, c’est les gens [que j’ai rencontrés] dans mon stage, que ce soit au MAPAQ ou chez Atkins et Frères, tous les gens que j’ai rencontrés pendant mes deux mois. Toutes les fins de semaine, je faisais du pouce pour aller explorer et je revenais le dimanche soir. J’ai rencontré du beau monde tout le temps, c’était vraiment extraordinaire ».

En vous souhaitant bien vite d’avoir l’occasion de faire ces mêmes rencontres…

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